Dimanche, baisser de rideau

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Dès le réveil, je comprends que la journée va être difficile. Alors que je sors de la tente pour me rendre à la tente de presse, je sens la fatigue. Je dois enjamber les fils en circulant entre les tentes, et mes pieds semblent peser une tonne. Tant bien que mal je sors de Paines Ground, et descend en salle de presse. Sur place, je rédige l’article de samedi. Mais je tombe de sommeil, parfois je pique du nez. Il faut dire que le Soleil qui tape fort, chauffe l’air sous la tente. Il y fait chaud. Je peine donc à écrire entre deux dodelinement de tête. Mais soudain quelqu’un me réveille en me tapant sur l’épaule. Une jeune femme me demande si je peux sortir rapidement pour photographier quelqu’un d’urgence.

Je n’ai pas retenu le nom de la personne, j’attrape mon appareil photo, et je sors. De l’autre côté du champ interstage un gars attend avec une autre fille qui discute avec lui. Je comprends qu’il faut le prendre en photo, portant un t-shirt Greenpeace. Je comprends aussi qu’il faut faire vite. J’avise le type, la lumière est crue et compliquée, je lui demande de se poser devant un logo love and peace, et de tourner la tête vers la lumière. Je prends une demi douzaine de clichés en cadrant au minimum sa tête et le t-shirt. Le mec s’impatiente déjà. Puis il veut contrôler les images, s’approche de moi, et veut voir les images en sur l’appareil. Je lui en montre une en disant qu’elle est pas mal. Il acquiesse et se tire en demandant s’il peut garder le t-shirt.

De retour en salle de presse, les deux filles me rejoignent et attendent les images avec impatience. Il faut trouver le moyen de les envoyer. Tout en cherchant une solution qui ne fasse pas appel au wifi saturé de la salle de presse, je m’interroge sur qui je viens de photographier. Car j’ai bien compris que ce n’était pas un random. J’interroge une des filles, et elle me répond: Andrew Garfield. Ma culture cinématographique étant très modeste, il me faut l’aide de Google, pour découvrir que c’est le nouveau Spiderman.

Suite à cet épisode, je termine ma séance de rédaction, puis je pars vers la Pyramide pour y voir Cat Stevens. Je suis content de voir ce grand ancien, et d’entendre quelques standards des années 60, mais c’est un peu mou et verbeux. Ca manque un peu d’âme, je trouve. Mais je reste jusqu’au bout.

J’opère ensuite un grand écart stylistique en partant à the Park, où je vais voir Viagra Boys. Pour ce que je sais du groupe, pour le moment, je m’attends un peu à quelque chose comme Sleaford Mods. Et peut-être aussi, le même genre de hold-up scénique. En fait, pas du tout. C’est une excellente surprise. Non seulement ça fait le show, mais en plus, je trouve ça pas mal du tout. La musique est là, c’est outrageux, et fun, il n’en faut pas plus pour faire un bon show.

Pour la suite, toute l’équipe se trouve à West Holts pour the Hu. Une fois de plus, je ne verrai pas Blondie… Sans doute ne les verrai-je jamais. Nous nous retrouvons tous devant cette formation mongole, pour le moins intrigante. En fait là encore, c’est un bon show. Les voix et les instruments traditionnels matchent parfaitement avec le style musical un brin metal. C’est surprenant, et je me laisse facilement prendre au jeu. Je passe un bon moment, et c’est typiquement le genre de musique idéal pour reprendre des forces en fin d’après-midi, un dernier jour de festival, alors qu’on va lancer ses dernières forces dans la bataille. Je finis le concert assis dans l’herbe, mais sans m’ennuyer une seconde.

Justement, en parlant de forces à conserver, j’hésite un peu à grimper à nouveau à the Park pour y voir Goldfrapp. C’est pas comme si je ne l’avais jamais vue… Mais finalement, je fais l’effort de grimper à nouveau la coline de Pennard, et retourne à the Park. Lors de ce concert, je me rend compte de quelque chose que je n’avais jamais constaté. Alison Goldfrapp est toujours d’une classe incroyable sur scène. La voix les costumes de scènes en font un personnage presque irréel. Les chansons aussi sont d’un glam! Mais pourtant, entre les chansons, elle se lache, et c’est étrange de voir que la chanteuse derrière le costume est assez lointaine de l’image qu’elle se donne sur scène. Etait-ce juste ce jour là, ou quelque chose que je n’avais jamais remarqué auparavant, quoi qu’il en soit j’ai découvert une facette de Goldfrapp que je ne connaissais pas. En ce qui concerne le show, pas de surprise, c’était parfait. Je suis client, je l’avoue, j’aime cette voix, et la musique qui va avec, et je n’ai pas été déçu, au point de trouver le set un peu court.

La soirée commence, le point d’orgue sera l’évènement du festival: le dernier concert d’Elton John sur ses terres. Déjà on voit que les allées du festival se sont quelque peu vidées, et sans doute l’Arena est-elle déjà pleine. En fait, ce n’est pas une question que je me pose bien longtemps. En descendant de the Park, je vois bien que c’est bondé devant la Pyramide. Je vais moi aussi y aller, mais pas tout de suite, j’espère qu’il ne va pas se passer ce qui était arrivé lors du concert des Stones, c’est à dire la fermeture du champ, saturé de spectateurs. Mais pour l’instant je descend à the Glade pour voir Mantra of the Cosmos.

A the Glade, il n’y a évidemment pas grand monde. D’une part une très grande partie du public est devant la Pyramide, d’autre part j’arrive trop tôt. Mais encore, qui sait que Mantra of the Cosmos est un nouveau projet composé de Shaun Ryder (Happy Mondays), Bez (Happy Mondays), Andy Bell (Oasis, Beady Eye), et Zak Starkey (the Who, Oasis)? Et surtout, qui a entendu le moindre morceau de cette nouvelle formation toute récente? Je m’installe donc sur un banc à côté de the Glade en attendant le début du concert. Je bavarde un instant avec un couple qui vient à Glasto depuis le début des années 90. Le parterre se remplit un peu, petit à petit, et le concert commence… OK, je suis content de voir enfin en vrai Shaun Ryder chanter, et Bez se dandiner avec ses maracas. Oui c’est l’image stéréotypée de ce qu’on pouvait imaginer des Happy Mondays. Mais les héros foutraques du Madchester des années 90 on pris un sérieux coup dans l’aile. C’en est presque pitoyable. Shaun Ryder braille plus qu’il ne chante, on sent nettement les limites de sa voix. Bez fait le beau, fait des signes à ses amis posés sur le côté de la scène. Une partie du public assez clairsemé au départ, fout le camp. C’est sans grand intérêt, et pire, au bout d’un moment, le groupe qui n’a plus de matériel reprend son single récement publié une deuxième fois: Gorrila Guerilla. En résumé c’est un naufrage. Il vaut mieux partir. Dommage!

Direction l’Arena pour ce qui doit être le dernier acte de ce Glasto 2023; le concert d’Elton John. C’est déjà commencé. Pour essayer de monter plus facilement dans les pentes de l’Arena, et plus exactement le champ Row Mead qui a été laissé libre, alors que les années précédentes c’était un camping, je décide de contourner la Pyramide par derrière du côté de San Remo. Pour cela, je traverse l’interstage, puis je longe la foule jusque vers Row Mead. En effet, l’Arena est pleine comme un oeuf. Impossible combien il y a de monde là dedans, certains diront 120 000 personnes. Il parait qu’il y avait 100 000 pour McCartney l’année précédente, alors pourquoi pas. Voici une vidéo prise, pendant le concert de Blondie approximativement à l’endroit où je me trouvais.

J’arrive donc avec environ 30mn de retard. Je dois avouer que je ne suis pas client, à la base, d’Elton John. Alors, je m’ennuie un peu. D’autant que je suis seul. Je finis par m’installer dans l’herbe, et ne me relève lors de moments un peu plus intenses. Tout d’abord, nous savions déjà qu’il y allait y avoir des invités sur scène. On avait évidemment cité des noms ultra prestigieux. McCartney vu dans les backstages des Pretenders et des Churnups, par exemple. Mais, ça, ça me paraissait improbable. Britney Spears, qu’on avait soit disant vu à l’aéroport de Bristol. Mais en fait, rien de tel. Les invités d’Eton ont té: Jacob Lusk des Gabriels, Stephen Sanchez, Brandon Flowers des Killers, et Rina Sawayama. Le concert se termine par Rocket Man, accompagné d’un feu d’artifice. Personellement, je n’ai jamais été pris par ce concert, mais jamais je n’ai regretté d’être là. D’abord, j’ai toujours apprécié à Glastonbury, d’avoir l’opportunité de voir des artistes historiques rock pop, que je n’aurais sans doute jamais vu dans d’autres conditions. J’avais là, l’opportunité de voir un monument, et dans des conditions toutes particulières, puisque c’était le dernier concert qu’il donnait dans son pays. Par ailleurs, je dois aussi reconnaitre que j’ai palpé l’émotion de milliers de personnes autour de moi. C’est là encore la particularité de Glastonbury, que d’être au milieu du public britannique, ce public qui connait bien évidemment par coeur l’oeuvre de ses artistes.

A la fin du concert, j’ai trainé dans l’Arena, voulant éviter de me jeter dans la cohue qui se diluait dans les allées du festival. Puis je suis allé à nouveau vers the Glade où se produisait Totally Enormous Extinct Dinosaurs. C’est là que s’est terminée ma campagne 2023 au festival de Glastonbury.