Une affiche réduite pour l’édition de Glastonbury 2023 a été officiellement dévoilée, comme c’est généralement l’usage avant le paiement du solde. Mais est-ce une bonne affiche?
Vendredi dernier dans la matinée, la première affiche, publiée sur le site officiel du festival, a levé en partie le voile sur la programmation de l’édition 2023 de Glastonbury. Cet évènement survient traditionnellement avant la fin de la période de paiement du solde, permettant ainsi aux possesseurs de tickets d’avoir, avant tout engagement définitif, les grandes lignes de la programmation à venir. Je rappelle que pour Glastonbury, les places se réservent en octobre ou novembre, sans que l’on ait la moindre information sur la programmation. Le paiement définitif se déroule début avril. Il est normal de savoir un minimum pourquoi on va payer près de 400€.
Chaque année, donc, nombreux sont ceux qui attendent courant Mars, la publication de cette fameuse shot-list. Elle met, en particulier, fin à la longue période de spéculations qui débute généralement dès la fin de l’édition précédente.Enfin, pas tout à fait… Nous allons y revenir plus tard. Commençons par regarder ce que cette affiche dévoile. Nous y trouvons 4 têtes d’affiche, suivis par une liste de 50 noms supplémentaires, en ordre alphabétique.
Les têtes d’affiche sont Arctic Monkeys (vendredi soir), Guns n’ Roses (samedi soir), Elton John (dimanche soir). et Lizzo. En ce qui concerne Elton John, il avait déjà été annoncé officiellement en décembre. Guns ‘n Roses avaient, eux, dévoilé leur venue fin janvier. Sa venue pour la première fois à Glastonbury, et surtout pour donner son ultime concert au Royaume-Uni sera un évènement grandiose. Après ça, il se produira encore 7 fois sur scène, dont 2 à Paris, et dira adieu au public le 8 juillet suivant à Stockholm. Concernant Arctic Monkeys, eux étaient largement favoris, et ont eu la préférence des bookmakers pendant toute la période de rumeurs. Donc, concernant ces deux lignes de programmation, pas de surprise. La vraie surprise c’est Guns ‘n Roses qui, comme Elton John, n’ont jamais joué à Glastonbury. La rumeur de leur venue courait bel et bien depuis l’automne, mais avec bien d’autres noms provenant d’outre Atlantique (Taylor Swift et Eminem en particulier). Quant à Lizzo, il est clair qu’elle ne pourra pas être en tête d’affiche sur la Pyramide, pas plus qu’elle ne peut tenir le rôle de l’artiste en teatime slot. Pourquoi est elle donc placée ici? Il semble que ce soit tout simplement la volonté de ne pas avoir la moindre femme sur la première ligne du poster, c’est d’ailleurs indirectement confirmé par Emily Eavis dans une interview au Guardian. Lizzo se produira juste avant les Guns ‘n Roses sur la Pyramide.
Le sunday teatime slot, lors duquel est programmé un artiste « légendaire » verra cette année se produire Cat Stevens. Légendaire en effet! Avec lui on reviendra à la période des prémices de Glastonbury, aux débuts des années 70.
En marge de ces noms qui vont occuper les places les plus en vues de la programmation, on peut noter les noms suivants:
Certains grands habitués du festival: Alison Goldfrapp présente quasiment toutes les deux ou trois éditions, Alt-J très régulièrement invités depuis la fin des années 2010, Fatboy Slim rarement mis à l’affiche, mais présent chaque année, Hot Chip, Manic Street Preachers de longue date programmés à Glastonbury (et auxquels reste attachée une célèbre histoire de toilettes), Phoenix, et Tinariwen.
Certains noms aussi étaient attendus comme Becky Hill, Blondie, et Guns ‘n Roses comme on l’a dit plus haut. On pouvait aussi tout à fait envisager Texas, qui sera tête d’affiche de la Glastonbury Abbey Extravaganza.
Notons aussi deux noms issus de la zone francophone avec Amadou & Mariam, et Christine And The Queens. Cette dernière fera son troisième passage à Glastonbury depuis 2016. Elle avait fait un carton sur place en 2016, ce qui avait été confirmé en 2019 lorsqu’elle était en tête d’affiche de l’Other stage en face des Cure. Il y a fort à parier qu’elle soit programmée sur la Pyramide cette année, et que de nombreux britanniques qui ont entendu parler de la petite française sans avoir eu jamais l’occasion de la voir, ne fassent le déplacement. On peut aussi supposer que ce soit pour elle un de ses plus gros concerts à ce jour.
Il y a déjà pas mal de choses, qui personnellement m’intéressent dans ce qui précède, mais chercher à être exhaustif, je vous livre une petite sélection de noms qui me paraissent importants:
Candi Staton, issue de la période disco, qui pourra attirer, je pense du côté de West Holts les amateurs du genre et aussi de soul music. Sans transition on passe à la jeune génération ultra mainstream avec Carly Rae Jepsen et son inévitable Call Me Maybe, ou Kelis. Tout autant sans transition je relève la présence de la quintette jazz Ezra Collective qui confirme bien l’éclectisme de Glasto, et surtout qui nous donne à découvrir bien des choses différentes. A mi chemin entre le mainstream et le non conventionnel je remarque le retour de Lana Del Rey. Je remarque le retour à Glasto de War On Drugs et Warpaint. Un qui devrait faire un carton à mon avis: Lewis Capaldi. Royal Blood devrait aussi attirer du monde à mon avis.
N’oublions pas les Sparks réminiscence baroque limite expérimentale des années 80.
Dans le domaine électro, à part l’inoxydable Fatboy Slim, je remarque la présence de Fred Again.., ainsi que des excellents anciens Leftfield. Sans oublier Rudimental qui va mobiliser les foules dans un style plus pop et grand public.
Côté rap hip-hop, la programmation s’étoffe, d’année en année, bien que cette fois ce style n’est pas représenté en tête d’affiche si on considère que Lizzo n’est pas totalement représentante du genre. On peut remarquer Lil Nas X, Stefflon Don, et Wizkid.
Et pour finir quelques noms attisent ma curiosité: Maggie Rogers qui parait captivante, Nova Twins qui semblent bien déjantées, Slowthai une sorte de rap fusion qui n’est pas sans rappeler quelques références aux années 90, et le son très expérimental de Weyes Blood.
En conclusion, cette première affiche n’est clairement pas la plus mauvaise qu’on ait vu. C’est très diversifié, bien que plus traditionnel que les dernières années. Il semble que la volonté déclarée d’Emily Eavis d’équilibrer hommes et femmes, et de diversifier les styles, n’ait pu être totalement respectée cette année. Mais cela semble cependant démontrer que les règles tacites d’une équité politiquement correcte ne crée beaucoup de contraintes artistiques qui peuvent déséquilibrer la programmation. Si garde cet exemple en tête, il est d’une part possible que le nombre d’artistes féminines soit nettement inférieur au nombre d’artistes masculins, et d’autre que la répartition hommes femmes hétérogène au niveau des styles (je pense à une sous-représentation des femmes dans le rock ou chez les DJ par exemple). La conséquence de tout ceci peut être la difficulté de créer une programmation homogène artistiquement en ayant autant de femmes que d’hommes. Je crois que la cause féminine peut davantage être promue, sur une scène autant observée que celle de Glastonbury, par une programmation qui mette en évidences des femmes brillantes, plutôt qu’en essayant de promouvoir des artistes qui n’ont pas encore les épaules pour tenir ce rang. En d’autres termes mettre en avant la qualité sur la quantité. Je tends à croire, par exemple, qu’en 2022, Diana Ross a bien plus impressionné que Billie Eilish. Emily Eavis a d’ailleurs précisé que l’année suivante il y aurait deux femmes en tête d’affiche. Comme chaque année j’attendrai avec impatience de découvrir les noms des artistes, Homme ou femme ça ne fait aucune différence pour moi, ce que je veux c’est une programmation qui me fasse vibrer.
Pour sortir de l’aspect polémique, je trouve que l’affiche de cette année est assez belle, et me fait envie. Mais surtout ne perdons pas de vue que nous avons là bien peu de noms en regard du programme complet, et qu’il y aura sans aucun doute bien des choses à découvrir sur place.